Le vendredi 21 octobre marque-t-il un tournant ? Quelques minutes après qu’Elisabeth Borne ait étalé les grandes lignes de son plan « France nation verte », première esquisse de la planification écologique promise, Emmanuel Macron a annoncé le retrait du pays du Traité de la charte sur l’énergie, qui empêchait, selon les observateurs, la mise en place de toute transition énergétique résolue.

Après une invitation à porter des cols roulés ou à envoyer moins d’e-mails rigolos pour sauver la planète, nous étions peu à penser que le gouvernement pouvait avoir d’autres tours dans son sac. Passé un temps aussi compréhensible que nécessaire pour reprendre nos esprits, et non sans renoncer tout à fait au scepticisme prudent que nous inspire tout élan écologique de l’exécutif, faisons le point sur ces deux avancées significatives.

22, v'là les chantiers

14h30, à la Recyclerie, dans le 18e arrondissement de Paris. Flanquée de ses fantomatiques ministres Christophe Béchu et Agnès Pannier-Runacher, Elisabeth Borne prend la parole pour exposer son plan estampillé « France nation verte ». Le nom fleure bon l’énième vœu pieu, mais passons. Après un exposé sombre de la situation actuelle, elle n’hésite pas à qualifier la transition écologique de "question de survie". Et de décliner ce qui ressemble à un discours de la méthode, à défaut de prises d’initiatives résolues. Mobilité, logement, production, consommation, biodiversité… la Première Ministre identifie 22 chantiers prioritaires, déclinables dans l’ensemble de ses ministères. "France nation verte sera l’étendard commun de nos actions pour la transition écologique. Les concertations qui se lancent nous permettront de disposer d’un plan complet, utile, efficace. Un plan que nous continuerons sans cesse à enrichir, en fonction des retours sur expérience et des besoins. France nation verte, c’est un chemin pour vivre mieux, en meilleure santé et dans une économie portée par une croissance nouvelle et réorientée", promet-elle. Si on pourra regretter que l’action concrète soit encore repoussée, on ne peut que se féliciter de cette démarche globale et systémique qui appelle chacun à prendre ses responsabilités : "Les collectivités ont un rôle crucial à jouer dans les mobilités, l'aménagement du territoire, la gestion de l'eau et des déchets… (…) Il faut une mobilisation de tous : État, collectivités, entreprises, citoyens."

Un traité maltraité

"Pas d’action concrète ? Et cette sortie du Traité sur la charte de l’énergie c’est quoi, du poulet ?", a semblé nous répondre, bravache, Emmanuel Macron dès 15h15, à l’issu d’un sommet du Conseil européen à Bruxelles. Ce Traité signé en 1994, devenu en pratique grand protecteur des énergies fossiles, permettait aux entreprises de réclamer des dédommagements à un Etat dont les décisions affectent la rentabilité de leurs investissements. Si l’UE avait obtenu une réforme, elle avait été jugée insuffisante par beaucoup, dont le Haut Conseil pour le Climat qui avait rendu mercredi un avis stipulant que "aucun des cas de figure (…) ne permettra aux parties signataires de s’engager sur une trajectoire de décarbonation de leurs secteurs énergétiques respectifs à l’horizon 2030 et à la hauteur de l’ambition de l’accord de Paris." Dont acte.

Il est définitivement trop tôt pour affirmer que la France est sur la bonne voie pour devenir une nation verte. Mais depuis le 21 octobre, elle semble s’être débarrassée de quelques teintes de noir. 

Antoine Morlighem

 

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